Bons momentos – Serginho Meriti (1981)

Quand on pose cette plaque de wax sur une platine, les premières secondes sont incomparablement frémissantes. Rares sont les disques dont l’entame prolonge avec tant de grâce le tour de chauffe du diamant. Ce premier passage « à vide » qui révèle la chaude texture du son vinylique et le niveau de crépitement de la galette. L’aiguille rencontre alors les microsillons receleurs de sons et les vibrations se propagent. Un riff lascif, sensuel. Un synthé funky qui caresse la nuque. Entre alors en piste Serginho, le héros du jour, l’homme qui vous susurre des douceurs à l’oreille et fait du zozotement un atour classe et sexy (tendez l’oreille il est aisément perceptible)


« Il existe des nuits… Impossibles à oublier… merci infiniment pour les bons moments passés avec toi, et pour les heures merveilleuses et sensuelles que tu m’as dédiées… »

Bons Momentos, phrase d’ouverture de l’album

Bons momentos, est un incipit à l’image de l’album éponyme : brillamment lancinant. Serginho Meriti y propose son éclatante vision -non d’un genre musical canonisé- mais du sang musical qui coule dans les veines brésiliennes, le samba. Un samba voluptueux et définitivement groove qui emprunte à la soul et au funk ses lettres de noblesse.

Cette musique est le produit d’un environnement tout particulier, c’est le son des faubourgs de Rio de Janeiro à l’aube des années 80. Produit climatique, historique, social. C’est dans la chaleur moite de ces périphéries populaires que la black music nord-américaine a le plus résonné aux côtés du samba. Serginho, imprégné par son environnement au point qu’il en affuble son nom de scène (il grandit à Sao Joao do Meriti, municipalité de l’immense conurbation urbaine que forme Rio de Janeiro) en recrache une fusion délicieuse. Une vibe peu anodine que l’on retrouve dans bien d’autres productions issues du même contexte.



Ce premier album, c’est avant tout la consécration d’un compositeur et parolier. Dès la fin des années 70, le jeune Serginho commence à collaborer sur des disques créés dans ces faubourgs cariocas et notamment avec Copa 7, groupe de Baixada Fluminense, pour lequel il participe à l’écriture de plusieurs morceaux sur les deux premiers albums.

Dans la foulée, il fait connaissance de Bebeto, prince montant du « suingue » pour qui il se met à écrire abondamment. Bebeto enregistrera 36 chansons de Serginho dont 11 sur les 12 que contient le très bel album Batalha Maravilhosa.

Grâce au succès des morceaux composés pour Bebeto, Meriti est introduit auprès du grand Roberto Menescal, l’un des papas de la bossa nova, qui le fait signer sur le label brésilien Polygram. Ainsi nait Bons Momentos, premier album sur lequel Serginho enregistre plusieurs des morceaux originellement composés pour Bebeto, dont les tubes Neguinho Poeta et Monalisa.



Serginho Meriti, s’il est un excellent interprète, est avant tout un compositeur génial. Installé dans la communauté de Mangueira, dans la zone Nord de Rio de Janeiro, il intègre rapidement l’aile des compositeurs de l’école de samba du même nom, matronne du carnaval carioca avec 20 titres à son palmarès. Il se rapproche des cercles des virtuoses du samba, et compose pour les étoiles du genre national parmi lesquelles Martinho da Vila, Fundo de Quintal, Roberto Ribeiro, Almir Guineto, Beth Carvalho, Bezerra da Silva, Elza Soares, et bien d’autres…

Infatigable, le gamin de São Jao do Meriti a à son actif plus de 1000 compositions dont 700 enregistrées pour seulement 3 albums à sa propre discographie. Trois disques rares et hautement qualitatifs, bien que Bons Momentos semble sortir du lot. Sur cette galette, rien à jeter, les titres s’enchainent, et le groove, suave et moelleux, ne s’évapore pas, comme sur Tipo Help, petit bijou délicieusement funky.


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