Willie Bobo – Bobo Mention (1967)

Willie Bobo fait partie des musiciens les plus emblématiques du New-York sauce latine des années 60 & 70. Percussionniste de génie, il s’essayera tour à tour au Mambo, au Latin Jazz et au Boogaloo. Focus sur Bobo Mention sorti en 1967, album méconnu où le groove de ce dernier se fait entendre.


William Correa bien avant d’être surnommé Willie Bobo voit le jour à New York en 1934. Né de parents portoricains, il grandira à Spanish Harlem. Imprégné par ce quartier en ébullition artistique, dès l’âge de quatorze ans, il s’essaye aux congas, bongos et timbales de manière autodidacte. Encore adolescent, à l’orée des années 50 il rejoint la formation de Frank « Machito » Grillo & his afro-cubans. À cette même période il rencontre Mongo Santamaría, une rencontre qui constitue un premier tournant dans la carrière bourgeonnante de Willie Bobo. Le mythique percussionniste cubain, tout juste débarqué aux États-Unis, deviendra son maître à jouer, tandis que Willie Bobo jouera les interprètes.

Puis, en 1954, suite à un conseil de Mongo Santamaría, Tito Puente l’engage dans son groupe. Après une escapade dans la formation du jazzman George Shearing, et alors que la fièvre mambo s’empare de New York, il rejoint son acolyte Mongo Santamaría au sein du Carl Tjader modern combo quartet. Des choix de carrière qui illustrent bien le parcours de Willie Bobo à la constante croisée entre musiques jazz et latine.

Lorsque les années 60 se profilent, c’en est fini du mambo et la salsa monopolise désormais les oreilles des new-yorkais. Willie Bobo demeure sur un créneau Jazz et se lance alors en solo avec un succès relatif. C’est en 1965 qu’un second tournant a lieu lorsqu’il rejoint, de nouveau, le jazzman Carl Tjaer pour lequel il rajoutera une touche toute latine sur l’opus Soul Sauce. L’album est un succès et c’est à la suite de cette expérience que Willie Bobo signe avec Verve Records et enchaîne les albums comme les succès.

Dans cette deuxième partie des années 60, Willie Bobo va devenir une grosse tête du Latin Jazz. C’est en 1967 qu’il sort Bobo Mention, un dix pistes de Latin Jazz feutré entre envolées instrumentales et morceaux chantés aux refrains entêtants. Sorti chez Verve Records, l’album fait la part belle aux congas chères à un Willie Bobo qui sort alors son sixième opus en solo.

À la percussion et au chant, Willie Bobo déroule un album au groove omniprésent et qui s’écoute sans effort. Du dansant Ain’t that right au tube en puissance Evil Ways en passant par les ballades Black Coffee et I don’t know, Bobo Mention est un modèle du Latin Jazz de l’époque.

Surtout, c’est une photographie d’un New York sauce latino qui tend enfin l’oreille au son d’une génération d’artistes originaires de Porto Rico qui a su mélanger les musiques latines avec le Jazz, le Rhythm & Blues et le Funk états-uniens. En signe de reconnaissance de ce Latin Jazz inédit, il signera par la suite chez l’incontournable label Blue Note au sein duquel il collaborera d’ailleurs avec Herbie Hancock, Miles Davis, Herbie Mann et d’autres.

Fort d’une carrière riche en sorties, reconnu par ses pairs, Willie Bobo meurt prématurément des suites d’un cancer en 1983 à l’âge de 49 ans. Il laisse derrière lui une empreinte durable et des mélodies efficaces aujourd’hui samplées notamment par The Beasties Boys ou encore The Chemical Brothers. On peut également l’entendre régulièrement dans des bandes sons originales, comme dans The Game ou encore Out Of Sight où apparaît son Spanish Grease, qui est certainement l’un de ses morceaux les plus connus. Il demeure un artiste qui n’aura cessé de construire une passerelle entre le jazz, musique noire nord américaine, et les rythmes latino-caribéens. Moins célèbre que Tito Puente ou Mongo Santamaría, eux aussi percussionnistes de génies, il fait pourtant partie des figures emblématiques de la musique états-unienne des années 60 & 70 et de celle qu’on surnommait alors Nueva York.

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